À 32 ans, Pauline a fait le choix audacieux de quitter le métier d’architecte pour se consacrer à une passion : le bricolage créatif. En quittant l'univers contraignant et souvent stressant des chantiers pour l'animation d'ateliers de bricolage, elle a retrouvé son besoin de créer de ses mains et de redonner du sens à son travail. Dans cet entretien, elle nous raconte son parcours de reconversion, le rôle déterminant de l'accompagnement qu'elle a reçu et la façon dont elle a réinventé sa vie professionnelle en réconciliant créativité, écologie et transmission. Un témoignage significatif sur l'importance de se connaître pour retrouver plaisir et joie dans son travail.
Quel a été le déclic de ta reconversion professionnelle ?
Architecte sur un chantier à Montpellier pour une agence basée à Paris, je savais que lorsqu’il toucherait à sa fin, je ne souhaitais plus retourner travailler en agence, à moins que j’en trouve une qui propose des axes écologiques et esthétiques en phase avec mes aspirations. Si plus jeune j’avais fait des compromis afin d’acquérir une expérience, je ne me voyais plus faire acte de candidature pour des projets qui ne me correspondaient pas en abîmant le territoire, consommant trop de ressources et produisant trop déchets, ou avec une dimension esthétique limitée.
J’ai alors profité du temps que m’offrait la fin de cette mission pour me faire accompagner. J’ai choisi TALENTS & TRAJECTOIRES parce que j’avais besoin d’apprendre à mieux connaître. Je ne voulais pas forcément qu’on me donne une liste de métiers à la fin cohérente avec mon CV, mais j’attendais d’avoir des clés pour avancer et choisir une voie qui me correspondait vraiment.
Qu’as-tu découvert grâce à cet accompagnement ?
J’ai compris que j’étais à ma place comme architecte mais dans un contexte qui ne me correspondait pas. Je suis plutôt quelqu’un de terrain qui fonctionne à l’intuition et qui a besoin d’exprimer sa créativité. J’aime faire les choses à ma manière et j’ai besoin de liberté pour chercher mes propres solutions.
Certaines des difficultés que je rencontrais tenaient essentiellement au contexte relationnel et contractuel. Dans les réunions de chantier, pour des histoires de contrat ou des questions de délais, les conflits sont monnaie courante et il faut être réactif pour défendre sa position… Moi qui suis plutôt une secondaire dans mes réactions, je n'étais pas dans mon élément dans cette ambiance.
J’ai aussi retrouvé mon besoin de façonner des choses grâce à la découverte de mes talents. Je me suis souvenue du plaisir que j’avais éprouvé un jour en fabriquant un meuble en carton pour ranger mes chaussures, ou encore dans mes cours de céramique.
J’ai compris que mon moteur était dans le plaisir de créer et de voir les choses se réaliser matériellement.
Ce que j’ai toujours fait, mais à la marge, et qui pourtant me comblait particulièrement.
D’architecte salariée, tu es devenue entrepreneuse. Parle-nous de ta reconversion ?
De fil en aiguilles, j’ai créé Les Briconomes. J’anime des ateliers de bricolage pour les particuliers et les organisations, avec des outils et à partir de matériaux de récupération. L’objectif est de permettre aux personnes de s’émerveiller en découvrant leur capacité à faire et à créer et en leur en donnant les moyens. Être autonome pour bricoler, et acquérir de l’aisance est bénéfique pour tous les publics : enfants, adultes, et aussi beaucoup les seniors, pour qui j’anime beaucoup d’ateliers
En parallèle, j’interviens dans des établissements scolaires, avec une casquette d’animatrice en architecture (une façon de ne pas complètement lâcher cet univers de l’architecture qui me plaît). Je prends en charge le volet animation de projets de désimperméabilisation et de végétalisation de cours d’école en associant les élèves, de la maternelle au CM2, pour que le projet soit le fruit d’une co-construction. En somme, je récupère leurs envies grâce à des ateliers créatifs et des enquêtes de terrain, et je les transmets à ceux qui vont dessiner le projet. J’apprécie beaucoup de créer avec les enfants.
Ces deux activités me permettent de vivre.
Quel sens nouveau trouves-tu dans tes activités professionnelles ?
Le sens, en effet, est important pour moi. À mes yeux, il a deux sortes de sens. Il y a d’abord ce que notre travail apporte au monde, et le sens de l’action en elle-même.
Parfois, je suis capable de me détacher du sens que mon action apporte au monde parce que je trouve que mon action a du sens en elle-même. Par exemple, lorsque je dois intervenir pour un événement RSE organisé dans un centre commercial, pour moi, le « grand sens » en termes d’ambition écologique n’y est pas. J’ai souvent l’impression de participer à du greenwashing pour une entreprise qui ne va pas dans le sens que j’espère. Mais lorsque je regarde l’intervention qui m’est demandée en elle-même, je vois que je vais permettre à des personnes de s’émerveiller de leurs capacités à faire des choses par elles-mêmes, qui plus est avec des matériaux récupérés, et donc de façon plus écologique. Et ça, pour moi, ça compte.
Aujourd’hui, tu sembles déployer pleinement tes talents.
Comment te sens-tu par rapport à avant ?
J’ai l’impression que ce que je fais est plus vivant !
J’ai l’impression que ce que je fais est plus vivant, parce que j’ai la chance de pouvoir faire du sur-mesure. Lorsque j’anime mes ateliers, je ne fais jamais deux fois la même chose !
Je ressens aussi beaucoup plus de plaisir qu’avant : quand je créé une animation, quand je l’anime, quand je vois le résultat et la joie que cela suscite chez le public.
Je dirais également que la beauté est davantage présente dans ma vie. Que ce soit dans ce que je réalise ou dans ce que les autres créent, qui dépasse parfois largement ce que je fais. J’adore voir ça !
Mais un des plus grands fruits pour moi, c’est de pouvoir façonner mon univers créatif et mon activité, de pouvoir faire plusieurs choses en même temps et de déployer de l’émerveillement. Ça n’a pas de prix !
Un des plus grands fruits de cette reconversion pour moi : pouvoir façonner mon univers créatif et mon activité à ma manière.
Pauline a été accompagnée par Philippe Martin en 2020. Elle avait alors 32 ans.
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